Femme de convictions
"Chaque arbre planté est un espoir de paix"
Née en 1940 à Nyeri, au Kenya, c'est une militante écologiste et politique, surnommée la "dame de fer africaine" ou encore plus affectueusement "la femme arbre" et "mère des arbres".
Ses parents, paysans, luttent pour la subsistance de leur tribu. Aînée d'une famille de six enfants, elle s'occupe des tâches ménagères, comme c'est la coutume au Kenya. Elle passe sa scolarité sur les bancs des écoles du village mais sa vivacité intellectuelle est vite remarquée et lui permet d’aller étudier aux Etats-Unis.
Au Kenya ; pays où les femmes jouent un rôle marginal sur les plans politiques et sociaux, elle fait figure d’exception : première femme d’Afrique orientale à passer un doctorat, à devenir professeur et à diriger un département à l’Université de Nairobi.
Biologiste, enseignante, militante des droits de l'homme, directrice de la Croix-Rouge kenyane, membre du Conseil national des femmes, secrétaire d’État à l’Environnement kenyan et militante écologiste, son chemin n’est pas seulement parsemé de gloire, sa vie est aussi un récit de sacrifices douloureux. Elle s’est éteinte le 25 septembre 2011 des suites d’un cancer.
Militantisme et politique
"L’environnement et les ressources naturelles sont un aspect important de la paix parce que, lorsqu’on détruit nos ressources, lorsque nos ressources se raréfient, nous nous battons pour nous les approprier"
Elle a également été dirigeante du Conseil national des femmes du Kenya.
Sous la présidence de Daniel Arap Moi, elle a été emprisonnée plusieurs fois et violemment attaquée pour avoir demandé des élections multipartites, la fin de la corruption et de la politique tribale.
Sa renommée mondiale a été acquise lors de son opposition au projet pour la construction de maison luxueuse d'Arap Moi, qui envisageait d'abattre des arbres sur plusieurs acres de terre.
Elle a été durement rossée par la police, notamment lors de manifestations pour sauver les forêts. L’Etat croit qu’en la menaçant et la brutalisant, elle peut être réduite au silence mais c’est une femme obstinée qui parle haut et fort ! Les brutalités n’ont pas découragé cette femme de conviction à dénoncer ceux qui ont corrompu son pays. D’après elle, depuis 20 ans, le système est devenu corrompu et destructeur, avec le phénomène des braconniers, des bûcherons illégaux, des charbonniers et même des barons de la drogue
Cette grande figure de la lutte pour la protection de l’environnement, pour la démocratie et pour les droits des femmes a œuvré dans le but qu’une nouvelle génération de dirigeants africains donne la priorité aux besoins du peuple.
La ceinture verte
"Planter un arbre, c’est une prise de conscience. Nous ne sommes rien sans notre environnement. Il faut arrêter de croire que notre espèce est la plus importante"
Elle a lancé le projet de plantation d’arbres "Mouvement Ceinture verte" (Green Belt Movement, GMB) en 1977. Elle a commencé en plantant sept arbres lors de la Journée de la Terre.
Soutenu par les kényanes à travers le pays, ce mouvement, promeut et protège la biodiversité, préserve les sols, crée des emplois en zone rurale, valorise l’image de la femme dans la société africaine et leur permet d’exercer leurs talents de dirigeantes.
Le grand objectif du mouvement est de faire comprendre à la population qu’il faut protéger l’environnement par la plantation d’arbres et leur gestion durable.
Ses méthodes ont également été utilisées en Tanzanie, en Ouganda, au Malawi, au Lesotho, en Ethiopie et au Zimbabwe. Aujourd’hui plus de 35 millions d’arbres ont été plantés au Kenya pour éviter la désertification des villages, l’érosion des sols, facteurs d’appauvrissement des populations vivant de la terre.
Cet acte est porteur d’un message simple: tout citoyen peut au moins planter un arbre pour améliorer son cadre de vie. Chacun réalise ainsi qu’il peut prendre en charge son environnement, premier pas vers une participation plus active au sein de la société
Son livre "Pour l'amour des arbres" met en évidence les liens entre l'environnement et la paix. Mieux, il propose des solutions efficaces pour faire échec aux menaces qui pèsent sur la biodiversité. Un formidable message d'espoir prouvant que, grâce à la pédagogie et à l'analyse, les consciences s'éveillent...
Wangari Maathai, a lancé plusieurs campagnes de plantations d'arbres. D’après elle, ce qui est vraiment important, c'est ce que nous faisons réellement ; démontrer l'engagement vis-à-vis de l'environnement en plantant un arbre.
Récompenses & bibliographie
"En protégeant l’environnement, nous améliorons aussi la façon de gouverner"
Prix Nobel
Première femme africaine à recevoir le Prix Nobel de la paix en 2004, pour "sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix".
Son approche globale du développement durable embrasse la démocratie, les droits de l’Homme en général et les droits des femmes en particulier, elle pense au niveau mondial et agit sur le plan local. La paix sur la terre dépend de la capacité à améliorer notre environnement.
Quelques-une de ses récompenses :
- 1984 : Right Livelihood Award appelé en français le Prix Nobel alternatif
- 1991 : Prix Goldman pour l’environnement
- 2001 : citée parmi les " Héros de la planète " par le « Time »
- 2004 : Prix Nobel de la paix
- 2006 : Chevalier de l'Ordre national de la Légion d'honneur, de la France
- 2006 : Docteur Honoris Causa de l'Université Waseda13
Elle a écrit et préfacé de nombreux livres, seuls quelques-uns sont traduits en français.
- "Un prix Nobel de la paix pour la planète", article de Wangari Maathai, L'Ecologiste n°14
- "Pour l'amour des arbres", préface de Nicolas Hulot
"Nous plantons les graines de la paix, maintenant et pour le futur"
"Une terre sans arbre est une terre morte"
* Avec tous ses diplômes, elle aurait pu vivre confortablement en Occident. Pendant 25 ans, on l’a abreuvée d’injures, menacée, battue, jetée en prison et interdit à plusieurs reprises de quitter le territoire. Pour elle, devenir militante n’a pas été une décision délibérée, mais elle n’a jamais regretté d’être restée au Kenya pour contribuer au développement de son pays. En restant dans son pays, en subissant des procès et autres tribulations, elle a eu plus d’impact que si elle était partie vivre à l’étranger. En vivant en Occident, elle n’aurait jamais eu assez de crédit devant les autochtones et les pouvoirs politiques.
De nombreuses personnes sont venues la voir pour lui dire que son travail les avait inspirés. Cela la réjouissait toujours car au début, il était difficile pour elle de parler : auparavant, des gens l’approchaient et lui chuchotaient qu’ils la soutenaient mais ils ne voulaient pas qu’on les entende, qu’on les voit avec elle car ils risquaient d’être sanctionnés.
* Il est impossible, à ses yeux, d’améliorer la qualité de l’environnement tant que les conditions de vie de la population n’auront pas elles-mêmes été améliorées. Les êtres humains font partie de la biodiversité. On a l’impression que les pauvres détruisent la nature, mais ils sont si préoccupés par leur survie qu’ils ne peuvent pas s’inquiéter des dégâts durables qu’ils infligent à l’environnement. Par exemple, à Madagascar, des femmes plantaient du riz sur les décombres d’une forêt qu'elles avaient brûlée pour créer des terres cultivables, cette zone était l’habitat naturel des derniers descendants d’une espèce rare de lémuriens. Paradoxalement, les pauvres, qui dépendent de la nature, sont aussi en partie responsables de sa destruction.
* Elle conteste des décisions prises par des hommes, ce qui lui a valu moult attaques et exactions.
Les hommes africains pensent que les Africaines doivent être dépendantes, soumises et surtout pas meilleures que leur mari. Au début, beaucoup de gens étaient contre elle parce qu’ils ne supportaient pas ses opinions tranchées. A certains moments, des hommes haut placés l’ont tournée en dérision. Ils espéraient qu’en mettant en cause sa féminité, ils allaient la faire taire. Ils ont compris plus tard qu’ils s’étaient trompés.
En 1989, elle s’est battue pour sauver le parc Uhuru de Nairobi. Elle soutenait qu’il était absurde de supprimer ce parc magnifique, en plein centre-ville, pour construire des immeubles. C’était le seul endroit de Nairobi où les citadins pouvaient passer un moment en plein air avec leur famille, sans être importunés. Quand elle a lancé la campagne contre la construction du "monstre du parc", surnom du projet immobilier, on l’a ridiculisée, on l’a accusée de ne rien comprendre au développement. Elle n’avait pas étudié cette discipline mais elle savait que, dans une ville, on a besoin d’espace. Heureusement, d’autres ONG et des milliers de citoyens se sont joints à elle et le parc a finalement été sauvé. Grâce à elle, cet espace de nature a été déclaré patrimoine national.
Son combat perdure dans le but de préserver les dons sacrés de la Terre : les Forêts et les Hommes.
Sources :
chauffeurdebuzz.com
grioo.com
unesco.org
afrik.com
wikipedia.org
Credits :
bibalex.org
nonviolence.ca